Aida Mahmudova est une artiste plasticienne d’Azerbaïdjan née en 1982 qui vit entre Londres et Baku en Azerbaïdjan. Elle est diplômée en beaux-arts de l’Université Central Saint Martins de Londres. En 2011, Aida a fondé l’organisation artistique YARAT ( qui siginifie “Créer” en azerbaïdjanais) sans but lucratif à Baku qui a vocation de mettre l’art au centre de l’éducation et de mettre en avant la nouvelle scène artistique d’Azerbaïdjan dans son pays et à l’international. L’Eclectique porte Baku dans sa ligne éditoriale et vous propose un focus sur cette contrée émergente au croisement de plusieurs continents en découvrant le projet porté sur la création d’Aida Mahmudova, personnalité éminente de la scène artistique à Baku.
Aida, pouvez-vous nous parler d’abord de votre travail d’artiste et de vos projets personnels ?
Mes créations évoquent la mémoire et la nostalgie, elles dessinent l’inspiration qui découle du paysage et tentent de capturer un moment dans une période dans laquelle l’Azerbaïdjan continue de subir une rapide modernisation. Le cœur de mon travail est la peinture et certaines scènes représentées dans mes peintures sont des scènes de la périphérie de Baku, explorées auparavant. J’ai aussi créé des installations en reformant des caractéristiques architecturales de la ville de Baku. Je travaille actuellement sur une nouvelle série de paysages marins à grande échelle qui s’inspire de la Mer Caspienne et je suis ravie que mes nouvelles créations pour la Biennale de Venise (22 mai au 15 novembre 2015) fassent parties de cette série. J’exposerai avec le groupe Vita Vale et je ressens que ce sujet aura de la résonance à Venise au Palais Garzoni, ville indissociable de son cours d’eau. J’attends aussi avec grande impatience ma première exposition individuelle aux Etats-Unis à la Galerie Leila Heller du 28 mai au 5 juillet 2015 à New York.
Vous êtes la fondatrice de YARAT, une organisation sans but lucratif d’art contemporain basée à Baku. Pourquoi l’avez-vous crée ? Qu’en est-il de la scène artistique émergente à Baku ?
L’idée de YARAT était dans mon esprit plusieurs années avant que je la fonde. Je savais depuis un moment que les artistes et l’audience à Baku devait bénéficier d’une infrastructure pour l’art contemporain plus établie. Il y avait de nombreux artistes excellentes et un public intéressé mais il y avait peu de plateformes permettant la rencontre entre les deux. La mission de YARAT est d’enrichir la compréhension de l’art contemporain en Azerbaïdjan et de créer une plateforme nationale et internationale pour le travail des artistes azerbaïdjanais. La plateforme fait appel à des artistes et met en œuvre des programmes d’éducation en Azerbaïdjan. Nos projets internationaux reflètent une partie de notre mission qui consiste à permettre à plus d’artistes d’Azerbaïdjan de participer à des expositions ou des biennales internationales. L’évolution de YARAT est aussi rapide que l’évolution et l’élargissement de la scène artistique à Baku et cette tendance va continuer. Il y a maintenant plus d’audience et plus d’opportunités pour les artistes. Cela n’est pas seulement dû aux activités de YARAT mais aussi à tous les nouveaux espaces culturels qui ont ouvert dans la ville.
Quelle est l’importance de l’art et de la culture pour les Azerbaïdjanais ? Est-ce que l’art et la culture sont réservés pour une minorité de gens qui constitue généralement l’élite et l’intelligentsia en Azerbaïdjan ?
Les arts plastiques ont toujours eu une grande importance en Azerbaïdjan, nous avons une une histoire culturelle très reconnue. Vu sa position géographique, au croisement de l’Europe et de l’Asie, l’Azerbaïdjan est un lieu d’échanges culturels et de contre-culture tout au long de l’histoire. Bien sûr la scène d’art contemporain est encore petite comparée à certaines capitales internationales et c’est une communauté très unie mais elle est certainement entrain de grandir. On peut le voir à travers les projets de YARAT mais aussi à travers la popularité grandissante des expositions à la Fondation Heydar Aliyev et le Musée d’art contemporain de Baku.
Quel est le pouvoir de l’art, la culture et la créativité sur les gens ?
Je pense que les arts et la culture sont une partie intégrante de l’éducation et YARAT utilise les arts visuels pour éduquer à l’intérieur et l’extérieur de notre pays. Les programmes artistiques de YARAT ont permis à des professeurs de l’université Dean of Art Central Saint Martins et du Royal collage of Art de Londres de venir enseigner à Baku. Nos expositions internationales ont également introduit des personnes du monde à notre dynamique et à la culture de notre pays. Ces puissants échanges, avec des artistes, des professeurs, des ambassadeurs ou des personnes curieuses, démontrent un autre fondement de YARAT qui est d’encourager l’échange d’idées à travers les cultures, les communautés et les pays.
L’Azerbaïdjan n’est pas un pays très connu dans les pays occidentaux et dans le monde arabe. Est-ce que vous pensez que l’art peut changer cette donne ? Est-ce que vous avez déjà pensé à un projet entre des artistes du monde arabe et des artistes d’Azerbaïdjan ?
Depuis la fondation de YARAT, je suis continuellement inspirée par l’intérêt des personnes désirant apprendre sur l’Azerbaïdjan mais aussi sur la région du Caucase. L’art est une porte d’entrée importante dans les cultures comme il est une part importante de l’héritage d’une communauté. L’échange d’idées se produit d’une manière tellement organique dans le processus de créativité que l’art peu facilement agir comme un puissant vecteur pour les relations entre les personnes et les plus grandes communautés.
Nous sommes enchantés par les projets qui mettent en relation des artistes azerbaïdjanais et du monde arabe. En 2013, YARAT a permis la première exposition Beyond Time and Beauty de l’artiste marocaine Lalla Essaydi en Azerbaïdjan au Musée de l’Art Moderne de Baku. Le dernier projet de collaboration de YARAT et des artistes arabes sera présenté lors de la 3ème édition du Festival de l’Art Public qui aura lieu de juin à août 2015. Wafaa Bilal, artiste iraquien, viendra à Baku pour travailler avec les artistes azerbaïdjanais Nazrin Mammadova et Frahad Farzaliyev, mais aussi Ergin Çavuşoğlu de Bulgarie et Ala Ebtekar des Etats-Unis. Wafaa Bilal va créer une interprétation spéciale de la sculpture de la chambre noire commandée initialement par Maraya Art Park aux Emirats Arabes Unis en 2013. Dans le contexte de Baku, Bilal va explorer la relation entre l’architecture et les façons de voir une sculpture qui sera mise en avant sur le Boulevard Baku.